Jeunes suburbains des banlieues pavillonnaires de Seattle, les membres de Mudhoney furent avant tout les sales mômes d'une tradition rock-garage. Héritiers des Stooges, des Sonics, du MC5 et d'une kyrielle de micro-formations de la galaxie 60's punk, Mudhoney n'est pas un groupe avant-gardiste. L'étincelle de modernité qui déclencha l'incendie grunge vint d'une appétence décomplexée vis à vis de la chose metal, un goût furieux pour le psychédélisme le plus acide et un sens de l'autodérision qui faillit lui être fatal. Esthète d'un son cradingue mais au tranchant précis, adorateur des pédales d'effets Univox Super-Fuzz et Electro-Harmonix Big Muff, un chant vinaigrant les grands crus des aînés, Mudhoney c'est des riffs toutes griffes dehors, une crécelle à réacteurs dont l'unique préoccupation est d'emmener le spectateur dans l'oeil du cyclone.
Mudhoney ne vendit jamais des palettes de disques, mais le succès relatif de leurs premiers enregistrements permit au micro-label Sub Pop d'atteindre la masse critique prompte à mettre des groupes comme Nirvana sur orbite. Marqueur d'une époque et d'un âge d'or du rock US indépendant, Mudhoney sur scène reste un événement. Tout d'abord c'est un groupe rare dans l'hexagone. Ensuite le live reste le théâtre des opérations ultime de ce groupe. Au menu des reprises érudites et des nouveaux titres, prétextes à reprendre la route pour entonner les nombreux hymnes foutraques de ces humbles et attachants trublions géniaux.
On peste parfois sur les premières parties imposées par les tourneurs, mais force est de reconnaître que la présence de White Hills en ouverture est une excellente mise en oreille. Un billet pour l'apesanteur carburant à une relecture du kraut et du space-rock. Un vol parabolique idéal avant que Mudhoney ne vienne vous cueillir comme on batte une balle de baseball.