Quelques mois après la fin du second conflit mondial, Mathilde, jeune volontaire de la Croix-Rouge assiste en Pologne les rescapés français avec quelques médecins. Un jour, une jeune religieuse vient requérir son aide. A contrecoeur, Mathilde décide de l'accompagner pour découvrir un couvent dans lequel plusieurs religieuses, violées par des soldats attendent des enfants. Ayant promis le secret, la jeune femme va voir ses convictions mises à rude épreuve alors que la situation se tend lorsque ses absences répétées sont découvertes.

Drame historique aux thèmes forts, Les innocentes dose très justement la part d'émotion et de sentiment pour plonger dans un récit âpre et personnel très fort. Dans le sillage de Lou de Lâage (qui fait montre d'un jeu plus retenu en jeune femme indépendante happée par les évènements), le spectateur découvre la cruauté qui a transformé le couvent en étouffant gynécée gouvernée par une mère abbesse que sa foi ne suffit plus à guider. Anne Fontaine réussit à déployer ce drame et ses répercussions avec un joli savoir-faire n'abusant jamais d'effets mélodramatiques pour donner de la force à un récit qui n'en requiert guère. Comme la jeune soignante, le spectateur découvre petit à petit les implications de la situation et ses enjeux : à l'intérieur comme à l'extérieur du couvent, bien des convictions se trouvent remises en cause. Presque absents, les hommes ne jouent dans ce drame qu'un rôle lointain. La caméra d'Anne Fontaine, jamais voyeuse ou exagérément sentimentale brosse une fresque dramatique intime et secrète. Une chronique intime forte, simple et sensible, intelligente mais jamais pompeuse ou inutilement maniérée, aussi efficace quand elle montre les étendues enneigées de la campagne polonaise que l'intérieur du couvent ou la vie quotidienne de Mathilde.